Reconnaissance de façade, mépris de fond : la France et les Kabyles

La voix kabyle ne peut plus être noyée dans les discours officiels qui prétendent parler au nom de toute la diaspora algérienne. Dans ce texte, Karim Achab dénonce avec clarté et fermeté une réalité que trop peu d’acteurs politiques français prennent en compte : la majorité des « Algériens de France » que le régime d’Alger brandit comme un levier d’influence sont, en fait, d’origine kabyle — un peuple qui rejette massivement ce même régime, autoritaire, répressif et corrompu.

Continuer à ignorer cette distinction, c’est cautionner l’effacement d’un peuple et laisser le pouvoir algérien exercer un chantage identitaire inacceptable sur la République. Il est temps que les responsables politiques français entendent la voix des Kabyles, reconnaissent leur histoire, leur culture, leur combat pour la liberté, et cessent de confondre diaspora algérienne et diaspora kabyle. Ce texte est un appel à la lucidité, à la justice, et à un positionnement politique clair.

L’État algérien brandit régulièrement la présence de cinq millions d’Algériens en France comme un levier d’influence. Cette affirmation est trompeuse.

Une large partie de ces personnes sont en réalité d’origine kabyle, un peuple qui, depuis longtemps, se distingue par son attachement à des valeurs démocratiques et son rejet de la répression exercée par le régime d’Alger.

La Kabylie ne se reconnaît pas dans un État algérien autoritaire, corrompu et mafieux, qui va jusqu’à laisser brûler ses forêts chaque été dans une logique de punition collective.

Il est donc injuste et dangereux de laisser le régime algérien instrumentaliser la diaspora kabyle pour exercer un chantage politique sur la France.

Il revient aux autorités françaises de reconnaître cette distinction et de soutenir les citoyens français d’origine kabyle dans leur quête de reconnaissance identitaire et de liberté.

En l’absence d’un véritable sentiment d’appartenance nationale, que la France n’a pas su pleinement cultiver auprès de certains de ses enfants issus de l’immigration, l’État algérien exploite ce vide en imposant un récit identitaire fondé sur l’islam politique et l’appartenance à la “Oumma”.

Soutenir le Mouvement pour l’Autodétermination de la Kabylie (MAK) et le Gouvernement provisoire kabyle en exil (Anavad) constitue une manière de redonner à la diaspora kabyle sa dignité et sa fierté d’être à la fois française et kabyle.

Cela permettrait aussi de priver le régime algérien d’un outil de pression indue sur la République

À bon entendeur salut….

Karim ACHAB

Karim Achab, ​universitaire et militant kabyle engagé dans la défense des droits du peuple kabyle et la promotion de la langue et de la culture amazighes. Il est professeur de linguistique à l’Université d’Ottawa, spécialisé dans les langues amazighes, notamment le kabyle et le touareg