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Quand l’Histoire dérange : le démantèlement de la statue d’Aksel en Algérie
C’est un réveil amer pour les habitants de Bouhmama, dans la wilaya de Khenchela en pays chaoui dans les Aurès. Ce mercredi 4 décembre, sous les yeux médusés de la population, les autorités algériennes ont ordonné le démantèlement d’une statue en bronze du roi Aksel (Koceïla). Réalisée par l’artiste chaoui Abderrazak Boussekar, cette œuvre monumentale, érigée avec soin, devait rendre hommage à l’un des plus grands résistants amazighs face à l’invasion arabo-musulmane.
Un symbole fort, réduit au silence
Le roi Aksel, figure incontournable de l’histoire nord-africaine, est célébré comme le stratège qui a vaincu les armées omeyyades en 683 à Tahouda, près de Biskra. En reprenant la ville de Kairouan, il avait montré au monde l’esprit indomptable des peuples amazighs. Pourtant, ce guerrier légendaire dérange. L’administration algérienne semble mal à l’aise face à un symbole aussi puissant, perçu par certains comme un rappel de la résistance à une domination culturelle et religieuse imposée.
La statue, qui devait être officiellement inaugurée par des militants ce mercredi matin, a été retirée sous un dispositif sécuritaire important. Pourtant, l’autorisation de son installation avait été accordée par le maire de Bouhmama, signe que le projet bénéficiait d’un certain soutien local. Mais face à la pression des courants islamistes et à l’intervention des autorités, ce soutien n’aura pas suffi.
Un effacement mémoriel
Ce n’est pas la première fois que l’histoire d’Aksel se heurte aux sensibilités politiques actuelles. En 2021, une autre statue dédiée à ce roi-guerrier, installée en Kabylie, avait été vandalisée avant même son inauguration. Les critiques dénoncent une Algérie qui honore davantage les figures des envahisseurs, comme Oqba Ibn Nafi, tout en effaçant ou marginalisant les héros locaux, porteurs de l’identité amazighe.
Non loin de Tahouda, lieu de la victoire d’Aksel, se trouve la ville de Sidi Okba, nommée en hommage au général arabe qu’il avait défait. Ce contraste illustre le déséquilibre entre les mémoires qui s’affrontent dans le pays.
Une indignation qui dépasse les frontières chaouies
Dans la région des Aurès, berceau des résistances amazighes, les habitants expriment leur colère. « Ce n’est pas seulement une statue qu’ils ont retirée, c’est un pan de notre histoire qu’ils veulent enterrer », déclare un militant de Bouhmama. Pour les militants, l’effigie d’Aksel ne représente pas qu’un homme, mais l’attachement des Amazighs à leur terre, leur culture et leur liberté.
L’affaire suscite également l’indignation en Kabylie et au-delà. Des voix s’élèvent pour dénoncer une politique culturelle jugée discriminatoire. « Il est temps de reconnaître que l’histoire de l’Algérie ne commence pas avec l’arrivée des Arabes. Les Amazighs ont toujours été les gardiens de cette terre, et Aksel en est le plus grand symbole », souligne une historienne de Béjaïa.
Un avenir incertain pour l’héritage amazigh
Le sort de la statue reste flou. Si elle a été retirée de Bouhmama, son démantèlement est un énième épisode de l’effacement culturel que dénoncent les militants amazighs. Pourtant, cette controverse aura ravivé la mémoire d’Aksel, rappelant à tous son rôle central dans l’histoire de la région.
En Algérie, où la lutte identitaire amazighe est loin d’être achevée, le retrait de la statue apparaît comme une bataille perdue, mais pas comme la fin du combat. Pour ceux qui luttent pour une reconnaissance pleine et entière de leur culture, l’héritage d’Aksel reste vivant, indomptable, comme au premier jour.