Les traumatismes psychiques des peuples colonisés et acculturés : la névrose collective

Les traumatismes collectifs, tels que les guerres, les défaites, la soumission à d’autres peuples, la destruction d’une culture ou l’obligation d’accepter celle du plus fort, engendrent souvent des troubles psychologiques et comportementaux chez les vaincus. Ces troubles peuvent être graves, durables, et marquer profondément l’identité collective. Tous les peuples colonisés ou acculturés ont vécu cette réalité douloureuse.

Le refoulement

Freud a démontré que chaque individu, de manière inconsciente, enfouit en lui-même des souvenirs traumatisants ou désagréables, souvent accessibles uniquement grâce à un travail analytique long et profond.

Ce mécanisme de refoulement ne se limite pas aux individus. Il existe également au niveau des collectivités humaines, notamment chez les peuples humiliés par des envahisseurs, colonisateurs ou dominateurs. Ces peuples refoulent dans leur inconscient les événements douloureux pour ne se souvenir que de ce qui est plus supportable.

Dans le cadre de l’histoire de la Bretagne, il est essentiel de comprendre ces mécanismes pour réécrire l’histoire de façon juste. Pendant des générations, les Bretons ont été formatés par des récits faux ou biaisés, notamment sous la Troisième République. Persuadés qu’ils étaient de simples « ploucs », les Bretons ont été poussés à se sacrifier pour une patrie qui n’était pas la leur, notamment durant la Grande Guerre, où 150 000 à 200 000 d’entre eux sont morts pour des causes françaises.

L’analogie avec la psychanalyse

Le travail de l’historien, s’il est honnête et rigoureux, peut être comparé à une psychanalyse collective. Mais au lieu d’individus allongés sur un divan, ce sont des peuples entiers qui sont confrontés à leur histoire refoulée. Cette démarche, cependant, doit respecter la liberté de conscience : chaque peuple doit pouvoir choisir d’accepter ou non cette vérité, comme condition essentielle de la guérison.

Je suis conscient de participer à un tel travail. Cette démarche s’appuie sur mon intérêt pour la psychanalyse, nourri pendant plus de vingt ans. J’ai longuement étudié les névroses traumatiques causées par des événements tels que les guerres, les occupations militaires ou encore les humiliations subies par les peuples.

Le silence des déportés et l’occultation des traumatisme

Les déportés, par exemple, parlent rarement de leurs souffrances à leurs enfants. Pourquoi ? Parce qu’ils craignent de ne pas être compris. Cette occultation se retrouve dans d’autres contextes historiques.

  • En Écosse, le traité d’Union avec l’Angleterre en 1707 est souvent décrit comme une trahison, où les Écossais auraient été « achetés et vendus par l’or anglais ». Ce souvenir douloureux est rarement évoqué.
  • Aux Antilles, l’esclavage a longtemps été occulté, non seulement par les anciens maîtres, mais aussi par les anciens esclaves, comme une honte collective.

En Bretagne, une situation similaire s’est produite. Jusqu’à récemment, beaucoup niaient que la Bretagne ait été envahie, battue ou humiliée. Certains historiens prétendent même que les invasions françaises de 1487 à 1491 n’étaient que des « opérations de maintien de l’ordre », ce qui est historiquement faux.

La négation des persécutions linguistiques et culturelles

Un exemple frappant de négation concerne la langue bretonne. Certains affirment que la langue bretonne n’a pas été persécutée, mais que les parents auraient volontairement poussé leurs enfants à apprendre le français pour leur offrir de meilleures opportunités. Cette vision est une falsification de la réalité.

Le professeur Kress, psychiatre alsacien ayant exercé en Bretagne, a été l’un des premiers à démontrer les effets néfastes de la privation de langue maternelle sur le psychisme collectif. Ce traumatisme linguistique a été aggravé par une campagne de dénigrement de la culture bretonne, où les Bretons étaient souvent insultés et déshumanisés.

Le devoir de mémoire : entre douleur et résilience

Il ne s’agit pas de cultiver la haine, mais de reconnaître les souffrances subies pour mieux avancer. À l’instar des Languedociens qui commémorent encore les massacres de la croisade albigeoise, les Bretons doivent se réapproprier leur histoire.

D’autres régions, comme la Kabylie, le Québec ou la Catalogne, mènent des combats similaires pour préserver leur identité face à des oppressions historiques.

De nombreux pays sont en train de procéder aux mêmes analyses que nous :
La Kabylie exècre et rejette avec violence l’arabisation qu’on a voulu lui imposer. Le Québec revendique sa vraie identité, qui n’est en rien anglaise, la Catalogne n’est pas espagnole.
Enfin, l’alsace, si chère à notre coeur, est une vraie nation, ni française, ni allemande, mais ALSACIENNE.

Louis Mélennec

Les peuples colonisés, acculturés ou opprimés doivent entreprendre un travail de mémoire pour se libérer des traumatismes du passé. La Bretagne, comme tant d’autres nations, a été marquée par des humiliations historiques, linguistiques et culturelles.

Reconnaître ces blessures est une étape essentielle vers la guérison collective et la préservation de son identité. Ce devoir de mémoire est indispensable, non pour entretenir la rancune, mais pour garantir la transmission d’une histoire fidèle et honnête aux générations futures.

Louis Melennec

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