Le 10 mai 1997, Jaafar Wahyoun tombait sous les balles d’un groupe terroriste alors qu’il enseignait les mathématiques dans un lycée d’At Yanni, en Kabylie. Derrière ce crime se cache bien plus que la perte d’un professeur ; c’est la disparition tragique d’un militant infatigable, une figure de proue de la cause kabyle amazighe, dont l’engagement n’a jamais faibli.

Né en 1957 à Tizi Ouzou, Jaafar Wahyoun a grandi dans une Kabylie en quête de reconnaissance culturelle et linguistique. Très tôt, il s’impose comme l’une des voix les plus courageuses de sa génération. En 1980, il devient l’un des acteurs clés du Printemps berbère, ce mouvement de révolte qui a secoué la région et marqué la lutte pour la reconnaissance de l’identité amazighe en Algérie. Ce soulèvement pacifique, réprimé dans le sang, n’a fait que renforcer sa détermination.

Pédagogue passionné et homme de lettres, Wahyoun ne se contente pas de la simple transmission des savoirs en classe. En 1981, il fonde Tafsut, une revue culturelle qui devient un véritable manifeste pour la promotion de la langue et de la culture amazighes. À travers ses articles, il dénonce l’arabisation forcée, défend la diversité linguistique et appelle à la dignité pour les peuples autochtones de l’Afrique du Nord. Son écriture, à la fois poétique et engagée, inspire une génération entière de jeunes militants.

Mais l’engagement de Jaafar Wahyoun avait un prix. Dans une Algérie déchirée par la montée du terrorisme dans les années 1990, ceux qui osaient défendre la diversité culturelle devenaient des cibles. Et c’est précisément pour avoir incarné ce courage que Wahyoun a été assassiné ce 10 mai 1997.

Vingt-huit ans après sa mort, la mémoire de Jaafar Wahyoun demeure vivante en Kabylie et au-delà. Il reste un symbole de résistance intellectuelle, un modèle pour ceux qui continuent de lutter pour les droits linguistiques et culturels des Amazighs. Ses écrits, son enseignement et son engagement persistent comme autant de flambeaux éclairant le chemin de la liberté.