Déclaration de Tamazgha 45ème anniversaire du Printemps Amazigh de Kabylie

Du fond qui remonte à la surface
À l’instar des années récentes, la période actuelle s’avère mortifère et surtout dépossédée de boussole. Nous constatons une Kabylie écrasée par le poids de l’oppression, de la répression et de la manipulation, dans laquelle la reddition des militants est érigée comme offre de soumission…

Les intellectuels réfractaires vivent sous la menace constante de l’emprisonnement, et nombre d’entre eux ont déjà payé leur audace de longues années de captivité suite à des condamnations arbitraires. La répression est omnipotente et a même atteint la diaspora kabyle.

Ce temps de « pause » morose doit se consacrer à la réflexion collective. La situation est tellement désespérante que même des « laboratoires d’idées » ou des « groupes de réflexion » seront inopérants.

Éventuellement, un ou plusieurs « think tanks », indépendants ou non, entre gens avertis, pourront intellectuellement ébaucher de nouvelles voies.

Mais d’évidents sursauts spontanés surgiront. Il faudra alors éviter les écueils comme ceux vécus lors du Printemps Noir de 2001 ou le « Hirak » que nous préférons au passage dénommer « Tanekra ».

Le mois d’Avril réveille, chaque année, une mémoire que rien ne peut effacer. En 1980, la Kabylie s’embrasait non pas sous l’effet de la haine, mais sous l’urgence de la dignité.

Quarante-cinq ans se sont écoulés depuis cette grande fierté des Kabyles : Tafsut n Imaziɣen (le Printemps Amazigh). Il est temps de regarder avec lucidité et sans complaisance le chemin parcouru.

Rétrospectivement, l’année 1980 marque l’impulsion cruciale qui a établi les bases du renouveau amazigh : mouvement revendicatif, massif avec des mobilisations de protestation pacifique, dans un esprit de solidarité. En d’autres termes, il s’agit, dans l’imaginaire des nouvelles générations, d’une pierre angulaire sur laquelle repose notre édifice.

En 2025, nous devons comprendre que la donne a radicalement changé. Le pouvoir algérien est devenu stratégiquement intelligent, car il a réussi à se maintenir seulement avec les concessions formelles ou discoureuses.

Notre camp, par contre, se retrouve désarmé et terreux.

Cette déclaration qui est en vérité un état des lieux est naturellement dissemblable aux précédentes. Face à la stratégie perverse du pouvoir algérien, nos avancées grandioses ont graduellement glissé vers le désarroi, le repli et l’inquiétude.

L’histoire nous a appris que toute situation bloquée se débloque à un moment ou à un autre. Ceux de l’État central ou autres qui aimeraient nous acculer au stade de zombie végétatif n’ont par contre pas compris ce que représente le mouvement identitaire d’un peuple. Or le nôtre l’est, et un jour ou l’autre les choses se renverseront. Comme l’a écrit un
révolutionnaire du début du 20ᵉ siècle, il y a des décennies où il ne se passe rien, et il y a des semaines où il se passe des décennies.

Comprenant que le chemin semble durablement (ou pas) escarpé, nous devrons nous montrer plus intelligents et plus courageux encore.
Tamazgha,
Paris, le 20 avril 2025.

Rédaction Kabyle.com
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