Godson MOULITE : L’écriture est un acte de résistance

Jeune journaliste et poète haïtien,  Godson MOULITE vient dans cette interview pour nous parler de son œuvre et de sa vision de la culture. 

Bonjour Monsieur Godson MOULITE, nous sommes ravis de vous interviewer sur Kabyle.com ! Qui êtes-vous, Godson Moulite ?

Godson MOULITE : Je suis un jeune journaliste et poète haïtien passionné par les mots, les histoires, et surtout la culture de mon pays. J’ai toujours cherché à explorer, à travers ma plume, les réalités sociales et politiques de la société haïtienne, tout en rendant hommage à la beauté et à la richesse de notre langue et de nos traditions.

Comment êtes-vous arrivé à la poésie ?

La poésie est pour moi un moyen d’exprimer des émotions profondes et de répondre aux questions existentielles que je me pose. Depuis mon plus jeune âge, j’ai été attiré par les mots, d’abord à travers la lecture, puis peu à peu à travers l’écriture. La poésie m’a permis de donner forme à ce qui souvent ne trouve pas de mots facilement, et de partager une vision du monde qui est la mienne.

Votre dernier recueil de poésie « rien qu’une bouffée de l’oubli », paru aux éditions Varella en décembre 2024, interpelle le lecteur sur l’état accablant dans lequel se trouve votre pays, Haïti. Pensez-vous que la plume du poète puisse être réconciliatrice ?

Oui, je crois fermement que la plume peut être réconciliatrice. Si elle est utilisée de manière consciente, elle peut faire prendre conscience des enjeux sociaux, éveiller les consciences et proposer une forme de dialogue. La poésie peut offrir une échappatoire, mais aussi une voie vers la guérison, un moyen de transformer la douleur en un message d’espoir et de résistance.

Vous êtes un défenseur de la culture haïtienne, de sa littérature. Est-ce qu’écrire, selon vous, en créole est une nécessité absolue aujourd’hui ?

Écrire en créole est fondamental. C’est une manière de revendiquer notre identité, de respecter nos racines et de renforcer la langue comme un vecteur de culture et de solidarité. Le créole est un langage vivant, porteur d’histoire et de significations profondes. Pour moi, c’est une nécessité non seulement culturelle mais aussi politique, car c’est un acte de résistance face à l’uniformisation du monde.

Comment vous définissez le « poète » ?

Le poète est avant tout un témoin de son époque, un observateur des réalités humaines. Il est celui qui, à travers la subtilité des mots, capte les nuances de la vie, qu’elles soient joyeuses ou douloureuses. Le poète n’est pas seulement un artiste, mais aussi un citoyen engagé, un éclaireur des zones d’ombre de la société.

Que pensez-vous de la place de la poésie aujourd’hui en Haïti ?

La poésie en Haïti a toujours eu une place centrale dans la culture, même si elle semble aujourd’hui parfois un peu marginalisée face aux défis socio-économiques. Cependant, elle
demeure un outil puissant pour ceux qui cherchent à comprendre le monde et à y trouver leur place. Aujourd’hui, malgré la crise, il existe une véritable ferveur autour de la poésie,
notamment à travers des événements culturels et des poètes engagés.

Quel est le rôle du poète dans la société moderne ?

Le rôle du poète dans la société moderne est de questionner, de provoquer, de déranger parfois, mais aussi d’offrir une vision différente du monde. Dans un contexte marqué par la
violence, la pauvreté et les inégalités, le poète peut être un agent de transformation, un catalyseur d’espoir. Il a également la responsabilité de documenter l’histoire et de mettre en
lumière les voix souvent ignorées.

Quels sont les poètes haïtiens et étrangers qui influencent votre écriture poétique ?

Parmi les poètes haïtiens, je citerais René Depestre, Jacques Roumain, et Emile Ollivier, dont les œuvres ont marqué ma vision de la poésie et de l’engagement. À l’échelle internationale, des poètes comme Pablo Neruda, Aimé Césaire, ou encore Langston Hughes ont également profondément influencé ma démarche poétique. Leurs écrits me poussent à continuer de croire en la puissance des mots.

Votre dernier recueil de poésie lu ?

Mon dernier recueil de poésie lu est celui de l’écrivain haïtien Ni pays ni exil de Ricardo Boucher. C’est un recueil qui résonne particulièrement avec les préoccupations sociales et
politiques de notre époque, tout en offrant une écriture d’une grande beauté et d’une profonde humanité.

Quel est pour vous le moment idéal pour écrire ?

Le moment idéal pour écrire, pour moi, c’est celui où l’inspiration frappe de manière inattendue. Parfois, c’est le matin, après une nuit de réflexion; d’autres fois, c’est le soir, lorsque la journée a laissé place à la solitude. Mais je dirais que c’est surtout le moment où le monde autour de moi se tait et où les mots se bousculent en moi, attendant de prendre forme.

Quels sont vos projets pour l’avenir ?

Mon projet à court terme est de continuer à travailler sur mes écrits, d’explorer de nouvelles formes poétiques, et de publier un recueil qui explore davantage les questions sociétales qui me préoccupent. À long terme, je rêve de participer à des échanges littéraires à l’international pour partager la culture haïtienne et faire entendre notre voix à l’extérieur.

En ce moment, Haïti traverse une crise politique très grave. En tant que journaliste, comment affronter le quotidien et gérer le stress ?

En tant que journaliste, il est difficile de rester détaché face à la gravité de la situation.
Toutefois, j’essaie de garder une certaine distance émotionnelle tout en faisant mon travail avec professionnalisme. La gestion du stress passe par l’écriture, la lecture et parfois,
simplement par un moment de silence. Il est essentiel de se rappeler que, malgré tout, la vérité doit être partagée, peu importe les conditions.

Merci beaucoup d’avoir répondu à mes questions ! Un mot pour conclure ?

Merci à vous pour cette belle opportunité. En conclusion, je dirais que, malgré les épreuves que traverse notre pays, la culture et la poésie demeurent des armes puissantes pour la
résilience et le changement. L’écriture est un acte de résistance, et tant que nous continuerons à écrire, à partager nos histoires et nos luttes, nous ne serons jamais vaincus.

Entretien réalisé par Amar BENHAMOUCHE

Amar Benhamouche
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