Victoire de la Kabylie républicaine sur le fascisme

En ce 3 août, 400 personnes étaient là à Tizi. l’Histoire ne pourra jamais les oublier. En pleine inquisition, malgré l’appréhension de toutes répressions, ils se sont déplacés de toute la région de Tizi-Ouzou pour dire non à l’intolérance, non à l’instrumentalisation des religions et pour revendiquer le droit de vivre libre et d’être respecté dans ses choix.

A ce rassemblement,le courage civil a atteint son pic dans une Kabylie qui s’est distinguée en Algérie, en Afrique du nord et dans tous les pays vivants le dictat islamiste. Relayée par la presse algérienne et internationale –française, belge, italienne, américaine et même arabe-elle a brillé par son refus de la soumission et son esprit républicain. Et par le rapport de force qu’elle a su imposer à un pouvoir et des salafistes qui n’ont eu d’autre choix que d’accepter en serrant les dents.Au rendez-vous de l’Histoire, elle a su accoucher d’une énième révolution inattendue malgré tous les maux qui la rongent. Kabyle.com y était, a assisté à la conception, à la réalisation et à l’après-évènement. Sans censure, ancré dans la vérité et sans complaisance, il couvre une seule chose pour ses lecteurs : le terrain, de fond en comble, qui a produit cet acte de résistance citoyenne unique dans l’histoire de la région.

Elle restera dans les mémoires, cette victoire, du 3 aout 2013. On savourera longtemps du souvenir des manifestants venus des Ouadhias, Ait Ouagnoune, Ait Ouabane, Tigzirt et autres localités qui ont répondu à l’appel de la Kabylie, à ce cri subit et inattendu de survie.On se réjouira longtemps du naturel qu’il y avait dans leur démarche. De leur sens contestataire sain et frais. Comme un gout de miel dans la bouche, cette sensation qu’on veut conserver à jamais, la réussite du 3 restera une source d’inspiration pour les militant-e-s du terrain et un souvenir qui réchauffera leurs cœurs pour affronter les jours de difficultés.

D’autre victoires attendent la Kabylie, la vraie, celle du terrain. Pour peu qu’on y travaille.La force de cet évènement n’est pas dans le nombre de manifestant, étrangement annoncé à 2 000 par certaines sources d’information. 200, 100 ou 50 auraient aussi fait notre fierté. La réussite de l’évènement réside dans une seule chose à nos yeux: que la Kabylie a pu mobiliser suffisamment de citoyens pour opposer un bras de force aux fascistes, seul motif de la non-répression. La Kabylie a démontré que si elle indifférente aux appels partisans, si elle ne veut se laisser représenter par aucune des figures ni structures politiques existantes, elle répondra tout de suite présent pour les combats qu’elle lancera elle-même.

« J’ai 18 ans. Mais je pourrai mourir pour ma liberté », nous dira ce jeune rouquin, des Ait Ouagnoune, le bras dans le plâtre, venu au réclamer le respect et la tolérance. « On ne mangera pas en cachette, et on ne jeûnera pas en cachette. Pour que chacun fasse ce que bon lui semble, et que l’on respecte son droit à la différence », disait aussi un orateur, avec des mots simples mais qui traduisent entièrement l’esprit du 3 Aout.

« Ce rassemblement n’est pas un rassemblement de non-jeuneurs », soulignera avec justesse Bouaziz Ait Chebib, président du MAK,au début sa trop longue prise de parole. Ceci est effectivement un rassemblement pour la fraternité et la tolérance, le déjeuner en public n’étant qu’une forme.Une  forme d’opposer une résistance et de réaffirmer les principes d’une société qui refuse de se voir en imposer d’autres qui vont la détériorer.

Bouaziz a aussi raison à un autre titre : le rassemblement n’est pas une manifestation de non jeuneurs ; il comptait de nombreux jeuneurs. Parmi eux il y avait même des pratiquants qui prient. Et comme Samia l’a souligné lors de son passage au Journal Télévisé de Dzair TV : il ne s’est jamais agi de dissuader les gens de jeûner. L’action n’a pas visé le droit de faire ramadan, mais le droit de ne pas le faire et d’être respecté d’égale manière, c’est-à-dire toléré sans devoir se cacher chez soi.

Le renouement de Tiziavec la tradition contestataire est magnifique et donne du baume au cœur, dans des temps lugubres que traverse notre monde. Plus émouvant encore, la réplique rapide qu’a donnée Vgayet avec son rassemblement de Aokas. Tahar Amichi, joint sur place, a souligné l’euphorie avec laquelle le littoral bougiotte a défié l’Histoire, avec ses 200 manifestants, qui ont, l’espace de quelques heures, réimposé la liberté et la tolérance en pleine dictature.

La star au déjeuner, la vraie

Loin des prises de parole, loin de l’intérêt des politicards intéressés par se faire voir et entendre, loin des grandes figures officielles de référence dont on a parlé et reparlé–ZedekMouloud, NafaKirèche et Ramdan Achab, entre autres-, il y avait un invité d’une valeur unique dans ce déjeuner républicain. HanineChikh a 25 ans, il est une victime du printemps noir. Ce garçon énergique et généreux a honoré l’évènement d’une société qui l’a pourtant oublié, une collectivité pour laquelle il a tout donné sans aucun retour. C’était en 2001 que ce jeune d’AtDwala affrontait la gendarmerie criminelle. Le coup partait, une balle meurtrière parmi d’autres atterrissait dans l’œil dont il a perdu l’usage depuis.  Il avait 14 ans. Merci Hanin d’être venu, honneur à qui mérite honneur.

Contexte et naissance

« Ca fait des années qu’on prépare ça. Depuis 3 ans que j’active à Tizi-Ouzou, j’ai toujours vécu le ramadan fasciste comme une terrible offense à la liberté ; j’ai toujours cherché un moyen d’ouvrir un débat collectif sur la liberté individuelle.  Braver l’interdit illégal et illogique de jeûner n’est pas seulement une bonne méthode pour créer ce débat, c’est aussi la seule dont on dispose. L’idée du déjeuner républicain a émergé simultanément de plusieurs directions, de chez plusieurs militant-e-s parallèlement ; il était dans l’air, la société kabyle l’attendait ». (Samia, une initiatrice)

« Un mois avant le ramadan, j’avais raconté à mes amis miliant-e-s comment on avait lancé une pareille initiative il y a une dizaine d’années, à Oued Aissi.Nous nous étions retrouvés à deux. Découragé, je ne pensais pas qu’elle pourrait réussir cette année. Le jour de l’anniversaire de la création du MAK, le 5 juin, lors de l’action écolo organisée, nous en avons parlé aux à Bouaziz Ait Chebib, dans le fourgon du retour. Mais nous en sommes restés là. A la mi-juin, c’est dans une formation sur les radios libres à Alger que j’ai essayé de sensibiliser des militant-e-s pour venir. Ca n’avait rien donné non plus. Par la suite, c’est encore à Alger que Samia en avait parlé avec des camarades féministes dans une rencontre à Ain Benian, là sans que l’idée ne prenne. C’est avec joie que nous apprenons que nous avons appris que Bouazizet d’autres militants ont finalement décidé de se jetter à l’eau.Nous, nous ne pensions pas pouvoir mobiliser, et là on courait des risques de répression trop graves pour les participant-e-s, vu les propos d’une avocate-militante que nous avions été voir au mois de Juin ». (Pika, initiateur).

Les autorités et cette « société » scandalisée

De la provoc ? Elle n’était pas percue ainsi par les initiateurs. « Car finalement manger est quelque chose qu’on peut faire chez nous, ou ailleurs, pas ensemble sur la place publique. On n’avait pas besoin de venir à la place Matoub pour manger », raconte Samia. Ce que les rassemblés sont venu faire, poursuit-elle, c’est poser le débat de fond sur le respect et la liberté, et pour appuyer la tradition séculaire en Kabylie qui fait émaner ces notions qui sont encore conservées dans la société kabyle ». Les propos profanés par Ennahar, qui présente le rassemblement comme un rendez-vous pour violer la pudeur du ramadan (traduction mot à mot de l’arabe, intihakhourmat ramadan) sont purement diffamatoires.

Halte au mensonge, halteà la récupération

Tout d’abord, il faut resouligner des principes : nous sommes des militants qui se battent pour la vérité. On ne peut donc utiliser les méthodes de la tergiversation. Couvrir l’évenement par des faits ou des chiffres gonflés, c’est de la tergiversation. Et la limite entre la tergiversation et le mensonge est diffuse, ce qui est un problème, puisque le mensonge dessert la cause de la vérité. Nous n’avons nul besoin de soumettre le nombre de nos valeureux manifestants pour la liberté à des interprétations revues à la hausse, qui pourraient nous démobiliser à terme. 300 ou 400 est en réalité un excellent début. Le libérateur cubain José Marti disait bien : ‘’il existe des êtres humains qui portent en eux la valeur de milliers d’êtres humains. C’est sur ceux-là que repose la Révolution’’. L’anthropologue Margaret Mead le confirmait: ‘’Il ne faut pas douter des capacités d’une minorité à changer les choses. En réalité, c’est ce qui s’est toujours passé dans l’Histoire’.’

Ensuite, et si l’action du 3 aout est unique dans son genre, en plus de la voir exagérée, on craint bien évidemment  de la voir récupérée ou usurpée. C’est tout de même la plus grande action populaire depuis une décennie et même Yennayer ne mobilise pas la moitié de ce qu’elle a mobilisé.

Il faut rappeler que l’action est autonomiste dans son esprit, et que ce sont les autonomistes qui l’ont préparée, lancée et organisée. Beaucoup de participant-e-s qui sont venus partagent naturellement l’idée de l’autonomisation régionale de la Kabylie, prenant conscience que ce que vit la Kabylie est en fait du colonialisme.

Mais la revendication ‘liberté de conscience et laïcité’ dépasse de loin le cadre d’un mouvement ou d’une idéologie politique : elle est philosophique, essentielle et spirituelle. C’est son essence même que le kabyle est venu défendre, c’est son refus viscéral de la restriction de liberté qu’il est venu exprimer, sa nature–pas un projet politique aussi pertinent soit-il.De ce fait, la mise sous la coupe du MAK du déjeuner républicain, par exemple, même si le mouvement compte parmi les principaux initiateurs, serait usurpatrice et dangereuse pour le développement de l’initiative. Et il l’avait très bien assumé dès le début : l’initiative est présentée comme celle de la société civile.

Cet abord était politiquement judicieux à plusieurs titres. D’abord,il serait extrêmement dommage de perdre ici les kabyles qui ne sympathisent pas avec le MAK. Ensuite, la Kabylie se méfie comme de la peste de partis et de mouvements politiques, qui ont terminé de la rouler dans la boue et les discours. Le MAK ne fait malheureusement pas exception à la règle, en tant que structure politique, il hérite sans le vouloir de la méfiance suscitée par la trahison du FFS et du RCD. Il porte aussi, il faut l’admettre, un tribut de lourdes erreurs à son propre compte. Il est important donc que l’initiative visant à « réaffirmer la neutralité religieuse de la Kabylie » reste chapeautée par une structure politisée qui ait de la neutralité sur le plan partisan.

De notre point de vue, et pour voir son idée progresser par la victoire du 3 aout, stratégiquement le MAK aurait dû se placer en arrière-plan de l’évènement, au lieu au contraire de se projeter aux devants.  Mais celui-ci de l’a apparemment pas vu ainsi. Les interventions de MAKistes ont véritablement dominé la prise de parole, par ailleurs beaucoup trop longue pour ce que les gens pouvaient supporter. Dommage pour le MAK, qui perd surement des points. « Dis-moi, c’est de ceux-là que viendra le changement ? dit Khellaf, de Akbil, faisant allusion à l’orateur MAKiste qui ne voulait pas lâcher le mégaphone. Quel changement ? C’est les mêmes que ceux qui nous gouvernent ! ».

On s’en doute, la victoire du 3 aout restera une avancée historique pour le combat pour l’autonomie en Kabylie, sur le terrain et pas ailleurs, c’est-à-dire là où il s’agit qu’elle progresse. C’est peut-être la première fois qu’on enregistre une action populaire aussi pertinente en relation avec le droit du peuple kabyle à son autonomie régionale. En tant que partisans de l’auto-gestion des peuples autochtones, conformément au droit international, dans les traces de la Catalogne républicaine ou des communautés  amérindienne en Bolivie, nous ne pouvons que nous en réjouir et continuer à travailler dans ce sens.

Mais la prudence est de mise.« Je ne serais jamais venu si ça avait été une quelconque organisation politique qui avait appelé », nous confie Ali, pourtant un militant visiblement formé.  Même chose pour Sofiane, de Ililten : « Si le RCD avait appelé, je n’aurais pas été. Pour moi ils sont directement en cause dans la mort de Matoub », poursuit-il. « Ce n’est pas d’autonomie que nous sommes venus parler », lance Katia, une jeune manifestante.

Tout pousse à croire que l’initiative gagnera de l’ampleur uniquement si elle est protégée de la récupération partisane. L’intelligence politique consistera en la prise en compte de cette donne pour un combat qui ne fait que commencer !

Les réactions –entre silence, falsification et « contre-manif »

Présents le jour J, des représentants de la presse locale ont activement couvert l’acte de résistance citoyenne. Mais chez les arabophones d’Echourouk et Ennahar, la démonstration de tolérance a été détournée à pique-nique visant l’insulte de l’islam et de ses constantes.  Leurs articles font état de prétendue consommation de sandwichs au porc et d’alcool. Ces journaux racontent même que l’ambiance était à la saoulerie, ce que kabyle.com,présent sur place dément catégoriquement. L’intox des arabophones relève de la manipulation la plus vile.

Mais la réaction la plus retentissante, c’est celle des islamistes, qui ont organisé un ‘’ftour collectif’’. Ces manifestants n’avaient jamais trouvé bon d’organiser une protestation contre le fait que le ramadan est un mois où les classes sociales défavorisées sont piétinées, saignées et oubliées, ce qui va contre un principe inhérent du ramadan tel qu’il le présentent. Ils n’ont jamais réagi à l’absence de l’état dans la flambée des prix des produits de base, en moyenne de 35% -selon une étude menée en 2009 par l’institut du monde arabe au Caire-, alors que des mesures étatiques simples pourraient réguler cette situation. Ces manifestants venus « défendre l’islam » ne sont jamais sortis du silence pour défendre la justice sociale, ni pour dénoncer la misère psychologique et la pression capitaliste vécue pendant ce mois,et qui mène les citoyens à des actes des plus désespérés. La prostitution est multipliée par 3 dans les pays musulmans, selon l’étude citée ci-haut.La consommation de la drogue par 6, ce qui certainement explique l’augmentation des crimes de 50% parallèlement.

Contre tout détournement algérianiste de l’initiative – l’autre usurpation

Il reste ici rappeler à rappeler un pilier de l’esprit de l’initiative : il est kabyliste. Il faut en éclairer les tenants et aboutissants.

Si « Kabylie » apparait dans l’appel au rassemblement, ce n’est pas un hasard. Ce n’est pas une faute de frappe, et ce n’est pas fortuit. C’est que c’est l’initiative qu’il faut pour la Kabylie.Mais il serait dommage que l’appel soit pour autant interprété comme une façon d’écarter délibérément le reste de l’Algérie et de Tamazgha: nous espérons au contraire et de tout cœur que le reste du pays et ses militants se sentiront inspirés pour s’organiser pour la liberté de conscience, avec les méthodes adéquates –et pas forcément un déjeuner républicain.

D’autres militants algérianistes, comme Yasmina Chouaki ou Nazim Mekbel, expriment pourtant une « crainte » de voir à part ce combat régionalisé et un « souhait » qu’il englobe toute l’Algérie. On rentre là immédiatement dans le discours qui a permis l’usurpation des combats menés par la Kabylie depuis 62 (et même avant !) pour la démocratisation d’une Algérie dont les 4 coins ne soutenaient pas, d’où son échec. Des régions arabophones entières qui se braquaient et boycottaient activement toute initiative émanant de chez nous, par anti-kabylisme, peut-être insufflé mais bien réel. 2001 vit encore dans nos mémoires, et si les kabyles se soulevaient alors contre des problèmes qui concernaient tous les algériens, ils tombaient seuls. Le coup de poignard a culminé lors du 14 juin 2001. Devant l’appel pacifique des kabyles, qui comptaient sur le caractère national de leur combat, c’est Alger qu’ils voulaient fouler en espérant encore la soulever. Des militants algérianistes crient encore pour dire que les algérois ne savaient pas, qu’ils étaient manipulés par la presse et que c’est pour ca qu’ils ne sont pas sortis le 14 Juin: ce n’est tout bonnement pas vrai. A l’époque il y avait encore au moins deux impeccables sources d’informations: l’incommensurable communiste Le Matin, et kabyle.com, que vous lisez actuellement.

La Kabylie reste marquée, saignée, par le décalage terrible entre ses aspirations, ses convictions et celles apparemment du reste de l’Algérie. Ce décalage existe, qu’on le veuille ou non :le fait d’avoir des convictions ne se mesure que par le degré de résistance qu’on oppose pour les conquérir, et pas par une énonciation théorique.

Dans le viseur presque exclusif de l’état actuel, la Kabylie subit désormais un châtiment collectif. Nos poubelles ne sont plus ramassées. Nous n’avons aucun parc digne de ce nom à Tizi. Nos gares sont éclatées délibérément autour de la ville et pour rendre infernal l’accèsà la ville aux montagnards ne possédant pas de voiture. Et il n’y a aucun investissement économique depuis dix ans. La Kabylie, en particulier, la grande, est sous embargo économique. Notre région paye très cher son engagement insurrectionnel depuis 62.

Si la Kabylie est obligée de tenir compte de son isolement pour avancer –en fait se sauver de la désintégration-, elle n’en devient pas pour autant rancunière. Elle reste au contraire étonnamment disposée à collaborer. Nous voulons l’autonomie pour vivre ensemble, non pas pour vivre en guerre. Et la cause de la tolérance avancera en Kabylie, mais désormais parce qu’elle se concentrera sur elle-même, sur la réaffirmation de ses valeurs ancestrales de respect, de tolérance, de liberté et de justice sur son territoire. Une fois libérée elle constituera  ensuite un exemple et certainement un allié de choix pour le reste de l’Algérie. Rappelons-nous, 1936-1939, du combat anarcho-communiste de la Catalogne républicaine contre L’Espagne franquiste, globalement fasciste dans son ensemble. Le parallèle historique est tenant pour l’illustration.

Pour en revenir à l’appréhension de nos amis algérianiste de voir l’idée régionalisée, nous répondons au contraire que c’est une absolue nécessité.  Le salafismeest un monstre très mélé à la société, et le combat contre lui est délicat et doit impérativement être régionalisé, localisé. Il doit tenir compte de la société où la critique doit être formulée. Il est strictement impossible de se battre pour la tolérance et la laïcité par les mêmes méthodes à Tizi(et Bejaia, qui a suivi le 3 avec un très grand naturel) et à Alger ou Tiaret. La donne populaire et culturelle locale est fondamentale. Si la méthode du déjeuner républicain est applicable en Kabylie, c’est aussi parce qu’elle traduit une attente citoyenne et parce qu’elle représente, comme l’exprimait brillamment le camarade Bouaziz, « une valeur ancestrale avant d’être une notion de modernité ». Pour la Kabylie, il s’agit en somme de se restaurer, de se rétablir, alors que peut-être pour d’autres régions algériennes ou nord-africaine, il s’agit plutôt de se renouveler. La tradition ne joue pas pareil pour tout le monde, nous devons la réhabiliter, les arabophones doivent la critiquer.

Ayant expliqué le caractère kabyliste pour des raisons stratégiques et historique, mais absolument non hostile, du déjeuner républicain que la Kabylie se propose de mener, peut-être la première action kabyliste de la Kabylie, nous appelons les camarades algériens de toute part de venir le soutenir. Parce que la Kabylie tolérante et émancipée d’aujourd’hui sera un pion indispensable dans la construction de l’Algérie libre de demain.

Samia Ait Tahar

Rédaction Kabyle.com
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