Le dessin de presse kabyle devient un acte de terrorisme

Le dessinateur de presse et caricaturiste kabyle, ancien collaborateur de Charlie Hebdo, Ghilas Aïnouche a été condamné à 10 ans de prison ferme par le tribunal criminel de Sidi Aïch (Bgayet) ce 30 novembre. Convoqué à de multiples reprises pour des dessins considérés comme diffamants, Ghilas Aïnouche qui vit en France depuis quelques années vient à son tour d’être condamné pour « atteinte à la personne du président de la République », « atteinte aux symboles de l’État » et « terrorisme » selon l’article 87 BIS du Code pénal algérien.

Un mandat d’arrêt international a été émis à son encontre pour ses dessins de presse. Certaines de ses caricatures sont régulièrement reproduites sur Kabyle.com avec l’autorisation de l’auteur, publiées sur les réseaux sociaux et dans les médias internationaux.

C’est la première fois dans l’histoire de l’humanité qu’un dessinateur est poursuivi pour « terrorisme » en raison de ses dessins dans lesquels il exprime ses opinions et ses idées de manière pacifique.

Ghilas Aïnouche n’a été représenté par aucun avocat. Cette nouvelle décision arbitraire de la justice algérienne intervient dans un contexte de répression massive du peuple kabyle. 53 Kabyles faussement accusés du meurtre de Djamel Bensmail et d’incendies criminels en Kabylie durant l’été 2021 ont été condamnés à la peine capitale. Belaid Abrika, figure emblématique de la révolte de 2001 en Kabylie, a été condamné à une année de prison ferme et une amende de 500.000DA par contumace, pour avoir tenté de déposer une gerbe de fleurs le 20 avril 2021 à Tizi Ouzou, en mémoire des martyrs du Printemps Noir et en commémoration du Printemps Berbère.

Le Président du Mouvement de l’Autodétermination de la Kabylie, Ferhat Mehenni, lui aussi condamné à la perpétuité en raison de son combat identitaire a exprimé toute sa solidarité en ces termes « l’incisif caricaturiste kabyle Ghilas Ainouche, à son tour, écope de 10 ans de prison ferme. Les procès pleuvent sur les Kabyles qui défendent l’universel à travers la Kabylie. Ma totale solidarité avec tous les condamnés pour délit de kabylité ».

Le 17 octobre 2022, le journaliste Abdou Semmar a pour sa part été condamné à la peine capitale, par le tribunal criminel de Dar El Beïda, pour des révélations sur la Sonatrach, l’entreprise pétrolière et gazière algérienne.

Face à l’adversité, aux difficultés qui s’accumulent depuis des années à nous exprimer librement y compris en France, notamment avec la nouvelle loi du 24 août 2021 qui renforce l’arsenal juridique de la République contre les séparatismes et porte atteinte aux droits des peuples à disposer d’eux-mêmes, l’enjeu est de faire circuler l’information, de renforcer l’indépendance de nos médias de soutenir les journalistes, la presse d’opinion et la liberté d’expression.

Des centaines de Kabyles sont actuellement emprisonnés injustement par le pouvoir dictatorial algérien, parmi eux Karima Nait Sid présidente du Congrès Mondial Amazigh, Bouaziz At Chebib fondateur de l’Union pour une République Kabyle, Lounès Hamzi et tant d’autres militants des droits de l’homme et de la cause kabyle.…

Au nom de la rédaction de Kabyle.com, de ses contributeurs nous apportons notre plus grand soutien à notre confrère Ghilas Aïnouche.

S. ARRAMI