La nécessaire décantation dans le flou

« Un homme averti en vaut deux » dit l’adage comme pour mieux nous prémunir de toute désagréable surprise qui viendrait heurter nos certitudes.

Dans le flou artistique qui a toujours enrobé l’Algérie, rien ne vaut une strate supplémentaire pour mieux brouiller les pistes à l’heure des décisions cruciales. Il faut dire que le cabinet noir – d’autre lui préfère l’État profond- s’y connait. En manigance, falsification, mystification, il n’a aucune recette à recevoir du pire des démons. Si le démon existe.

Entre les ragots colportés sur des figures se revendiquant de la « famille qui avance » chère à Feu Djaout et la désignation des Islamistes de Londres comme agitateurs des foules, le tout sous l’arbitraire d’une justice de nuit, la décantation, somme toute nécessaire, s’avère périlleuse.
Qui a tort et qui a raison ? Qui est l’ennemi et qui est l’allié ? Qui incarne le camp des lumières et qui représente celui de l’obscurantisme?

Lors d’un meeting à Tizi-Ouzou au plus fort du Printemps Noir, feu Hachemi Cherif avait fourni les clefs de déchiffrement des messages cryptés du pouvoir bipolaire État-DRS qui a toujours présidé aux destinées du pays.

L’on consent des concessions aux démocrates pour affaiblir les islamistes et quand les premiers prennent du poids on rééquilibre le jeu en octroyant des avantages au profit des seconds. Ce que l’ancien leader du MDS n’ajouta pas et que l’on peut intégrer à l’équation, ce sont les restrictions des champs des uns et des autres lorsque des ajustements nécessaires s’imposaient.

Fait nouveau et notable : depuis le déclenchement du soulèvement populaire qui a entrainé l’effondrement de la façade civile de la junte militaire, les deux camps qui se neutralisaient réciproquement par le passé font désormais l’objet de pilonnage simultané. Comme si le pouvoir se sentant acculé de toute part ne veut rien céder sous peine de disparaitre au moindre vacillement.

La Kabylie s’émancipera-t-elle des jeux d’équilibrage ?

Longtemps considérée comme, tantôt une variable d’ajustement, tantôt comme une force de contrepoids, la Kabylie a toujours rempli en parallèle, souvent sans le vouloir, parfois sans le savoir, un double rôle déterminant : elle sert d’ennemi intérieur, indispensable à toute dictature soucieuse d’ alimenter un nationalisme béat, et réservoir de compétences pour la gestion des affaires courantes et les sales besognes qu’incarnent ceux que la vox populi désigne sous le sobriquet accusateur de KDS.

Seulement, depuis le 22 février de l’année passé et une prise de conscience massive du reste du pays, grâce notamment à Facebook et autres réseaux d’information alternatifs, toutes les attaques contre la Kabylie s’avérèrent vaines et infructueuses, voire contreproductives.

Il serait redondant d’énumérer les actions des barbouzes en direction de cette terre qui a souffert le martyr, mais il convient de rappeler que les premières recettes élaborées pour venir à bout du bouillonnement social avaient toutes visé cette région. Allant jusqu’à souiller des légendes de la Soummam et à inventer des aberrations historiques du type Novembrya-Badissya.

Le reste des algériens ont enfin réalisé que le monstre kabyle n’était qu’un épouvantail savamment entretenu dans le but de scinder un pays pour mieux l’apprivoiser et l’asservir. Il reste aux kabyles de tirer les leçons de l’exhibition éhontée d’un des leurs dans la douleur la tristesse du cimetière.

Farid C.