Esotérisme et Tifinaghs

L’appellation Tifinagh veut dire « notre trouvaille ». Chacune des 25 lettres communes aux différentes langues berbères est en soit en symbole. Une fois combinées elles sont censées créer un effet magique, des formes extrêmement géométriques propices aux illusions d’optique.
On compte environ 300 signes complexes en Tifinagh résultant de l’association de caractères simples.

La dimension ésotérique importante chez les Anciens est encore présente dans la conscience des femmes Touareg qui l’utilisent pour des usages assez restreints comme des rites magico-religieux (épitaphes, plaques indicatrices, déclarations amoureuses).

Chaque lettre est énigmatique à l’image de la lettre Z (l’AZA) le symbole utilisé par tous les berbères. Si l’imagination est parfois le règne du vrai, on peut se laisser aller à toutes les dérives. Pour anecdote certains n’hésitent pas à expliquer la variation de la lettre aza en lettre greco-latine z par le seul concept du mouvement des lettres dans l’évolution historique.

Avec les nécessités de l’informatique l’alphabet tifinagh a été standardisé (néo-tifinaghs) .

Les lettres sont dotées d’un sens astral, humain et dans l’action.

Lettre N première lettre de l’alphabet tifinagh.

Ainsi la lettre N représentée par un trait vertical et qui se prononce en ou anou, symbolise le ciel, sur le plan de l’humain la science et dans l’action la puissance crée. Cette lettre possède en elle le souffle immense et unique de Dieu, la cause primordiale de tout, le début du nombre.

Lettre L illa, faîte de deux traits verticaux désigne la terre, la sagesse et la puissance fécondée. C’est le nom du Dieu suprême des Numides.

Lettre M iemm, en forme d’un croissant en trait rectiligne, a pour connotation l’eau, l’intelligence, la puissance fécondante. C’est la matière qui naît, grandit et meurt.

Lettre R ierou à la forme d’un cercle est ce croissant lunaire qui a fait sa révolution pour devenir la lune. Il matérialise le sexe féminin, l’enfant. C’est aussi le nom d’un Dieu des Libous qui n’offraient de sacrifice qu’à la lune.

Lettre S iess, un cercle avec un point en son centre, est la manifestation du soleil. Iess était le Dieu du Soleil chez les Berbères (jour se dit toujours ass). Il symbolise le mouvement, la diffusion, le perpétuel recommencement, la force virile et le principe fécondant.

La voyelle I en zigzag ou en aspect de foudre, signifie la force qui frappe. Il dirige les nuages, la pluie et apporte la réussite.

Lettre T « iette « en forme de + représente l’étoile « itri », ou la porte. Sur le plan de l’humain il est l’oeil, la vérité, la beauté. Dans l’action il est le jaillissement de la source. Iedd était la déesse nourricière des Numides.

Lettre G qui se prononce comme un G ou un K a une valeur symbolique d’activité humaine et par delà celle des forces de la Nature.

Lettre B « iebb » un cercle divisé en deux représente la malédiction, l’esprit négatif.

Lettre D sous la forme d’une flèche triangulaire dans le sens de la hauteur symbolise la substance, l’humanité, l’effort et la lutte.

Stéphane ARRAMI

Sources : Tifinagh vol. 1 n°3-4 juillet 1994
Libération, 27-28 juillet 1996, L’écrit Touareg du sable au papier
Gabriel Camps, « Recherche sur les plus anciennes inscriptions libyques de l’Afrique du Nord et du Sahara « Bulletin archéologique du C.T.H.S., n°s 10-11, 1974-75.
Salem Chaker, Texte en Linguistique berbère (Introduction au domaine berbère)