El-Assad renversé : quelles conséquences pour l’Algérie ?

Le 8 décembre 2024 restera gravé comme un jour charnière dans l’histoire contemporaine du Moyen-Orient. Après une dizaine de jours de combat acharnés avec la coalition des groupes rebelles, la capitale syrienne, Damas, est tombée. Cette date marque la fin du règne de Bachar el-Assad en fuite. Ce renversement, bien plus qu’un simple changement de régime, ouvre une nouvelle ère d’incertitudes et de bouleversements géopolitiques, et ses ramifications se font déjà sentir, jusqu’à Alger. Derrière les grandes stratégies diplomatiques et les alliances brisées, se cachent des trajectoires humaines, des espoirs et des craintes partagés par des peuples qui rêvent de liberté ou redoutent le chaos.

Un choc pour les tyrans d’Alger : entre alliés et réalités

En Algérie, la chute d’El-Assad est suivie avec une attention particulière. Le régime algérien, depuis des décennies, partageait avec la Syrie une alliance discrète mais solide, cimentée par des intérêts mutuels et une méfiance commune envers l’Occident.

Mais au-delà des discours officiels, l’inquiétude gagne les cercles du pouvoir. Ce bouleversement montre que même les régimes les plus enracinés ne sont pas à l’abri. Dans un pays où les revendications sociales et politiques ne cessent de croître, cette chute résonne comme un avertissement. L’Algérie, dont l’économie repose largement sur des alliances stratégiques avec la Russie et une diplomatie non-alignée, pourrait se retrouver isolée si les cartes régionales sont rebattues. L’Algérie joue un jeu dangereux, si le pouvoir ne s’adapte pas, il pourrait être le prochain à tomber.

La France silencieuse : entre pragmatisme et dilemme moral

Malgré les liens historiques avec la Syrie, ancienne colonie sous mandat français, Paris a choisi une posture de retenue. Officiellement, les autorités françaises appellent à une transition démocratique et une reconstruction inclusive. Mais ce silence en dit long. C’est comme si la France avait peur de sa propre histoire.

Pour les réfugiés syriens en France, la chute du régime est un mélange d’espoir et de douleur. Hana, une Syrienne de 35 ans vivant à Lyon, confie : « Mon cœur est rempli de joie pour mon peuple, mais je pense à tous ceux qui sont morts pour en arriver là. Nous avons perdu une génération entière. »

Le contrôle kurde : un défi dans une Syrie morcelée

En Syrie, la situation reste complexe. Un tiers du pays, notamment dans le nord-est, demeure sous contrôle kurde. Cette région, administrée par des forces locales comme les Unités de Protection du Peuple (YPG), est désormais confrontée à des défis gigantesques : maintenir sa sécurité, gérer les relations avec une Turquie du dictateur Erdogan hostile, et naviguer dans les eaux troubles d’une transition politique fragile.

Pour les populations locales, la stabilité semble encore loin. Les ambitions kurdes pour une autonomie durable risquent cependant de se heurter aux appétits des puissances voisines.

L’Iran affaibli : une page qui se tourne

La chute d’El-Assad signifie aussi un coup dur pour l’Iran, principal allié du régime déchu. Depuis des années, Téhéran avait investi massivement en Syrie pour maintenir son influence au cœur du Levant. Désormais, ce pilier stratégique s’effondre, laissant la République islamique face à de nouvelles vulnérabilités.

Sans la Syrie, l’Iran perd un corridor essentiel pour soutenir ses alliés comme le Hezbollah au Liban. Pour les familles syriennes, l’effacement progressif de l’Iran pourrait être une chance de retrouver une souveraineté trop longtemps confisquée.

Les Kabyles et l’effet miroir

En Kabylie, les événements syriens suscitent un débat vif. Beaucoup y voient un écho aux luttes identitaires kabyles. « La chute d’un tyran est toujours une victoire pour les peuples opprimés », affirme Malik, militant du Mouvement pour l’Autodétermination de la Kabylie (MAK). Pourtant, cette chute ne garantit pas la liberté, rappellent certains.

Saad, un professeur d’histoire à Tizi Ouzou, nuance : « Le vide politique peut être aussi dangereux qu’un régime autoritaire. Mais cela nous inspire, car cela montre que même les régimes les plus puissants peuvent tomber. » Pour les Kabyles, la quête de reconnaissance culturelle et politique reste une priorité, et les leçons de la Syrie sont analysées avec soin.

Le parti Baath : une idéologie à l’origine des malheurs des amazighs et des arabes

Créé en 1947 à Damas, le parti Baath, avec son slogan « Unité, Liberté, Socialisme », a captivé une génération de leaders arabes en quête de pouvoir. Cependant, ses promesses de progrès et d’unité ont rapidement tourné au cauchemar. En prônant une centralisation autoritaire et une homogénéisation culturelle, il a étouffé les identités locales et les mouvements démocratiques dans plusieurs pays.

En Irak, sous Saddam Hussein, et en Syrie, sous la famille el-Assad, le Baathisme a évolué en une doctrine de répression, où la dissidence était écrasée au nom de l’unité nationale. Pour beaucoup, la Syrie a donc joué un rôle clé dans l’exportation de modèles politiques qui ont nourri la division et la dictature dans le monde arabe.

Pour des peuples comme les Kurdes, les Kabyles ou d’autres minorités culturelles dans la région, le baathisme a signifié une négation de leurs identités et une marginalisation systématique.

Et maintenant ?

La chute d’El-Assad n’est pas la fin, mais le début d’une nouvelle ère, marquée par des espoirs, des défis et des luttes à venir. Pour l’Algérie, la Syrie et la région, les jours à venir seront décisifs. À travers les perspectives de ceux qui vivent ces bouleversements, une chose est claire : les peuples, malgré les oppressions et les tragédies, aspirent toujours à un avenir meilleur.

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Rédaction Kabyle.com
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